lundi 30 juillet 2007

BIENVENUE A KEMET # 3 - Contact

Une nuit, un incident s'est produit, l'alerte sonnait comme une trompe de la mort, tous les prêtres accouraient vers la pyramide, complètement affolés et criant au désastre. Dans la précipitation, je n'ai pas pu voir tous les détails, mais même de loin, un homme en flamme se voit de suite, surtout lorsque ce n'est pas le seul dans ce cas. Ce qui est encore plus énigmatique et qui a attiré mon attention, c'est le fait que personne n'en parle, même pas les élèves et surtout pas les principaux intéressés, comme si rien ne s'était produit. Ce qui est sur, c'est que l'infirmerie a été longtemps occupé par les prêtres ouabou-Sekmet, ce qui veut dire que l'état de santé des malades devait être très grave et/ou dû à un excès d'Hékaou car ils ne se déplacent jamais en vain, surtout pour de simples prêtres, ce qui est encore plus suspect.

Je m'apercevais de plus en plus, à ma grande fierté, que j'étais dans un endroit hors du commun, déjà, par rapport à l'enseignement qui s'y pratiquait, ainsi que ce lieu mystérieux. Kemet est connu dans le monde entier pour sa culture et son art, mais surtout dans le domaine religieux et ésotérique. Il n'y a pas de meilleur endroit, à part peut être le pays des deux fleuves, pour apprendre à développer les dons invisibles. D'un autre côté, c'est là où je me dis combien je suis naïf, je suis loin d'être dans une cité normale, j'aurai dû m'en rendre compte de suite, mais comment apercevoir l'évidence lorsque l'on vient d'un village formé de simples huttes ? Maintenant, avec le recul, je vois d'avantage dans ces lieux et je compte bien en faire le tour pour me faire une idée dans sa totalité.

Le meilleur endroit pour une vue panoramique quasi totale est le port, surtout que c'est l'endroit le plus proche de ma résidence. Tout commence dans les eaux primordiales à Kemet, réduit à un fleuve pour seul chemin d'accès, car aucune visite impie n'est permise, mais pour ma part une barque a suffi. Ce port est suivi, par deux entrepôts qui accueillent les marchandises utiles pour notre survie et la continuité de la logique du site, une allée en pierre nous permet d'avoir un accès direct à la pyramide centrale, la vue est magnifique, un Lion vous accueille de toute sa magnificence et vous impose le respect des lieux, comme un contrat que l'étranger est obligé de passer s'il veut continuer sa route, plus loin, en suivant le chemin, des hectares de terres avec des jardins d'une beauté calculée, pas de place pour le hasard.

J'ai une vue d'ensemble superbe du haut de ce pont, je ne me souvenais point de l'étendue, des hectares entiers qui abritent des dizaines de bâtiments et sûrement plus encore vu la densité de la forêt de palmiers, je suis ébloui par le soleil reflétant sur le calcaire blanc des pyramides, qui sont, non pas au nombre de deux comme je le pensais, mais bien trois, enfin pour les plus grandes.


En me dirigeant vers la troisième pyramide, sous les palmiers, je tombais sur une petite place ronde, pourvue de bancs tout autour et d'étranges petites maisons en bois, reliées au sol via un bâton, seuls les oiseaux pouvaient y rentrer, mais une fois au centre l'atmosphère est devenue lourde et pesante et de nombreux chuchotements résonnaient dans ma tête en devenant de plus en plus perceptible jusqu'à ne laisser qu'une seule voix bien audible, "choisis, choisis moi......" ; "Honore moi, sers moi et je te guiderai" ; "si, tu sais qui je suis, ferme les yeux et tu m'apercevras". En effet, en fermant les yeux je vis un babouin à consonance bleu sur un nuage, Djehouti dans sa forme cynocéphale. "Trouve mes trois noms et tu auras toute ma connaissance". La voix et la pesanteur s'atténuérent tout doucement, laissant place aux chants des oiseaux, à nouveau, je m'assis, interloqué, presque choqué par l'événement, un Dieu m'avait choisi et ce n'est pas anodin, c'est un privilège. Mais pourquoi devrais-je faire un choix ? Pourquoi moi ?


Je rentrais de suite vers mes appartements la tête submergée de pensées, de questions diverses assez confuses, plus de motivation, plus de temps non plus pour continuer ma visite, la faim me terrassait également. Dans les couloirs, la conversation principale des autochtones était la nouvelle réforme visant à priver les prêtres de la majorité de leurs pouvoirs décisionnaires sur les décrets qui sont mis en place par Pharaon. Ce dernier est accusé de vouloir enrayer la division des cultes à son profit, si cela se produit, le Dieu vivant, fils d'amon prendra une énorme importance, ce qui réglera certains conflits d'intérêts, mais ne garantit en aucune façon l'équité et la stabilité de la justice, car ensuite il pourra faire ce que bon lui semble, sans en référer à quiconque, du moins telles sont mes positions et mes déductions à ce jour.


Le lendemain et les jours qui suivirent, je m'affairais, avec discipline, à continuer mon enseignement qui prenait une tournure plus que positive. L'écriture n'avait dorénavant plus de secrets pour moi ainsi que le ba et le ka, mais le Shout restait ma faiblesse, sûrement à cause de la peur qu'engendrait cette énergie encline au déclin et au négativisme, la pensée de me retrouver privé de mon raisonnement propre, l'émergence de la Gorgone qui est en chacun de nous, la vision et les sensations qu'inspirent ceux qui en sont possédés, toutes ces raisons ne me donnaient en aucune façon l'envie et la motivation d'aller plus loin dans ce domaine.

Mais il fallait tout de même que je passe aux exercices pratiques, mes dons naturels étaient dorénavant amplifiés par ces nouvelles théories et il arrivait quelquefois que j'use de cela, juste pour essayer. Je m entraînais au début sur mes camarades qui ne se rendaient compte de rien, je leur commandais de faire un mouvement de trop ou d'oublier leurs pensées de l'instant, je m'effaçais de leur champ de vision, me rendant du coup invisible, en les bousculant, pour bien me prouver la réussite de mon acte. Je ne m'essayais plus aux prêtres car la plupart me repéraient quasiment de suite, à cause de ma lacune effrayante qu'est le Shout, mais les résultats que j'obtenais me donnaient foi en moi et en mes capacités qui ne pourraient qu'augmenter avec le temps et quelques efforts.

Au premier mois d'hakhet, là où tombe les larmes des Dieux et que hâpy se gonfle d'orgueil, un parchemin me fut parvenu, me convoquant à une réunion extraordinaire des prêtres instructeurs, visant certainement à me tester. Une semaine m'était accordée pour m'y préparer. Durant ce temps impartit, je redoublais d'efforts, révisant à la bibliothèque, m'entraînant deux fois plus en prenant certains risques sur des personnes sensées être plus fort que mes camarades, je dormais très peu et lorsque j'y arrivais je faisait des rêves étranges, des sortes de visions mélangés à une réalité flou, ce n'était pas tant les images qui me troublaient, si bizarre quelles soient, mais les sons, plutôt les voix, la voix qui disait : "As-tu réfléchis à ma proposition?" ou "Il est maintenant temps" ou "Souviens toi, et tu sauras le choix à faire". Ce sont les quelques phrases dont je me souviens, le reste est si flou.

La semaine passa à une vitesse fulgurante, je me suis juste réservé le dernier jour pour bien me reposer et dormir plus que de raison en prenant une décoction à base de plantes de mon village natal, je me mis sur le dos, les bras croisés, en me concentrant, de manière à endormir également mon Ka et mon Ba, afin que toutes mes forces soient au maximum.

Le lendemain, je me préparais nonchalamment, calmement, avec beaucoup de lacunes, soit, mais qu' importe, je restai tout de même le meilleur des prêtres-étudiants. Après avoir frappé à la porte de la grande salle où était prévu mon entretien, la surprise me frappa de plein fouet, une vingtaine de personnes étaient assises en demi-cercle, face à un promontoire en bois laqué. Je reconnus mes instructeurs ainsi que mon Oncle mais pas les autres qui étaient masqués par capuches de lin épais noir, pourvus d'un bâton Was qui certifiait un haut rang chez les dignitaires religieux. Malgré ma surprise, je restais concentré et alerte, je m'avançais à pas tranquilles vers eux sans sourciller et les saluaient de la tête.

"Nous nous sommes réunis aujourd'hui, 1er jour du mois de Djehouti....", Ce nom résonna en moi et toutes les images vues en rêve ainsi que les paroles me revenaient en mémoires d'un seul coup, j'ai eu l'impression, un court moment de recevoir toute la lumière de Ra dans les yeux, je compris à cet instant le message mais pas le but. "... de la saison d'Akhet, dans le but de vous soumettre aux tests, ensuite, après délibération, nous jugerons bon de vous proclamer prêtre ou non". Je fis tout ce qu'on me demanda et je le réussis avec brio, même les deux ou trois choses concernant le Shout me fut facile à réaliser, j'ai eu certainement de la chance pour ce dernier, s'ils savaient qu'ils m'ont donné les seules manipulations que je savais parfaitement faire !

Les prêtres Was se levèrent et frappèrent tous de leurs bâtons, ma tête et mon esprit vacillèrent, j'étais proche de l'évanouissement, mais pourtant je ne m'effondrais pas, leurs voix me parvenaient "Setesh, Djehouti, Ousir, Oupouhaout, Hor .... choisis ton affiliation". Les visages de tous ces Dieux tournaient autour de moi en me tendant les mains, sauf Djehouti, les bras croisés, le regard fixe et autoritaire me brûlait le visage. Les paroles des prêtres Was répétaient en boucle les différents choix. "DJEHOUTI" Dis je, et son visage souris et rayonna, me disant "tu ne le regretteras pas, tu as fait le meilleur choix".

Mais pourquoi ai-je encore maintenant ce doute, le doute de ne pas avoir eu l'opportunité du choix ?

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